HISTOIRE
Première guerre mondiale 1914-1918
Bien que n'ayant pas eu à subir les mêmes malheurs que les villages proches du front, Couvonges ne fut pas épargné par la guerre:
En 1914, dans le cadre de la bataille de la Marne (des combats ont eu lieu à proximité des villages voisins de Mognéville et Vassincourt), plusieurs obus se sont abattus sur Couvonges et ont détruits le manoir et d'autres habitations environnantes .
Le texte écrit par un soldat au dos d'une carte postale témoigne de cette période :
Robert-Espagne le 2 décembre 1917
Mon cher Riri
Aujourd’hui dimanche, le matin je lave mon camion et procède au graissage. J’ai du travail jusqu'à 11 h., moment de la soupe.
En mangeant on nous distribue : 1 paquet de tabac et un morceau de savon. Comme dessert il y a de la confiture et du café.
Après midi, avec les deux sapeurs du 1er génie Vin et Danest nous allons promener à pied à Couvonges, petit village à 4 km. de Robert-Espagne où il y a actuellement le 224e d’artillerie en repos.
La température se rafraîchit et de 14 h. à 15 h. il tombe de la neige, assez serrée, mais malgré ça elle ne tient pas parce que de suite après le soleil fait une légère apparition.
La fin de Couvonges a été complètement incendiée par les boches, qui en 1914 ne sont restés que 4 jours dans le pays.
Bons baisers (signé illisible)
Deuxième guerre mondiale 1939-1945
Un Lancaster est abattu
Entre le 12 et le 18 juillet 1944, trois vagues de bombardement sont lancées sur la gare de Revigny, noeud ferroviaire important situé sur la ligne Paris-Strasbourg.
Au cours de ces expéditions nocturnes, plusieurs bombardiers, des Lancasters, sont abattus par les allemands et s'écrasent dans la campagne meusienne.
Lors du premier raid, au cours de la nuit 12 au 13 juillet, 4 Lancasters sont tombés : 2 à proximité de Montiers-sur-Saulx, 1 à Véel et 1 à Couvonges. Tous les occupants, qui appartenaient au 103ème Squadron de la RAF, sont tués.


A bord de l'avion qui s'est écrasé dans un bois situé à l'est de Couvonges se trouvaient 6 anglais et 1 canadien. Ils ont été inhumés le matin du 14 juillet 1944 dans le cimetière communal où ils reposent encore aujourd'hui :
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Sergeant J.S. Eastham, flight engineer (ingénieur volant), anglais, 29 ans
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.Sergeant K. Gaythorpe, air bomber (bombardier mitrailleur), anglais, 21 ans
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. Flight Sergeant G.O. Olson, navigator (navigateur), canadien, 31 ans
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. Flying Officer G.R. Philipps, pilot (pilote), anglais
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. Sergeant J. Rhodes, wireless operator (opérateur radio), anglais
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. Flight Sergeant W.S. Bancroft, air gunner (mitrailleur), anglais 31 ans
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. Sergeant J. Kilgour, air gunner (mitrailleur), anglais 21 ans
Bibliograhie : La R.A.F. et la Meuse, Club Histoire du collège de Revigny, 1987.

Le 29 août 1944
Après les débarquements alliés en Normandie le 6 juin 1944 et en Provence le 15 août, l’armée allemande est partout en déroute. Des renforts sont alors envoyés afin de retarder la progression des libérateurs vers l’Est. C’est ainsi que le 20 août 1944 la 3ème Panzergrenadier Division, unité de Heer, sous les ordres du Général-Major Hans Hecker, quitte la région de Florence pour être transférée par voie ferrée dans la région de Saint-Dizier. Dès le lundi 28 août, cette unité se trouve engagée face aux éléments avancés du XIIème Corps de l’armée Patton. Parallèlement, les incidents se multiplient dans le sud-ouest du département de la Meuse : le 27 août, à 3 km de Robert-Espagne, tous les occupants allemands d’une voiture de tourisme sont tués par le maquis F.T.P. de la forêt de Trois-Fontaines ; plusieurs convois allemands sont mitraillés par la résistance sur la route de Vitry-le-François à Bar-le-Duc.
Dès le 27 août, Couvonges reçoit la visite d'un premier détachement et le 29 août, à l'aube, un convoi allemand entre dans le village. Les habitants sont réveillés et les véhicules sont camouflés. Deux heures plus tard, arrivent d'autres soldats du Panzergrenadier Régiment N°29, issus de la 3ème Panzergrenadier Division. Primitivement destinés au front d'Afrique du Nord, ils portent des culottes courtes kaki et sont en bras de chemise. Des batteries de mitrailleuses sont installées à chaque entrée du village et les habitants ont pour interdiction de sortir.
Le pillage du village est alors méthodiquement organisé. Vers midi, des feux sont allumés aux extrémités du village. 20 hommes du village sont rassemblés dans un grange puis ils sont ensuite emmenés sur un petit pré : aligné sur deux rangs, ils sont ignoblement exécutés.
Le soir venu, les soldats quittent le village. Ce n'est que le lendemain que les habitants rescapés, qui avaient fui l'incendie et s'étaient cachés dans la forêt voisine, découvrent les corps des victimes.
Au total, 26 des 44 hommes du village, âgés de 17 à 85 ans, ont été tués. 54 maisons sur 60 ont été brûlées. Sur 120 habitants, 102 sont totalement sinistrés.
Invité par le Comité du Souvenir de la vallée de la Saulx et par la ville de Bar-le-Duc, le Général de Gaulle vient se recueillir sur le lieu de l'execution le 28 juillet 1946.
A cet emplacement, à la sortie du village en direction de Beurey-sur-Saulx, a été érigé un monument commémoratif. Il a été inauguré le 29 août 1949 par le général Zeller, commandant de la 6ème région militaire.
Une cérémonie à lieu chaque année en mémoire des victimes du 29 août 1944.


Article de l'express publié le 29 août 2014
Le massacre de la vallée de la Saulx, un crime de guerre nazi méconnu
Robert-Espagne (France) - C'est probablement le plus méconnu des grands massacres de civils commis en France par les nazis: 70 ans après, les derniers rescapés de la tuerie de la vallée de la Saulx (Meuse) y pensent encore "tous les jours".
Ici ni mémorial ni musée, mais des monuments épars, plaques commémoratives et noms de rues rendant le 29 août 1944 omniprésent dans ces villages reconstruits dans les années 1950, bordés par la Saulx, une petite rivière sinueuse, des champs de céréales et d'épaisses forêts.
"Aujourd'hui encore, l'odeur du feu me rappelle à chaque fois le village en train de brûler", confie François Reboulet. Agé à l'époque de 19 ans, il s'était échappé depuis son jardin en rampant dans un fossé, traqué par un side-car allemand pétaradant à quelques mètres au-dessus de lui.
Georges Marandel, 91 ans, évoque ses "sueurs froides" quand des soldats allemands ont inspecté l'abri où il se cachait avec des femmes de sa famille, sans le trouver.
Et Lucette Purson, 84 ans, se souvient de la dernière fois où elle a vu son père et son frère de 16 ans, quand les Allemands sont venus les chercher alors qu'ils venaient de se mettre à table.
Furieux en raison de sabotages ferroviaires à répétition les jours précédents et d'un accrochage avec des résistants le matin même, les Allemands décident ce jour-là de terribles représailles: quatre villages de la vallée sont cernés, les hommes arrêtés, regroupés à la sortie des villages puis abattus à la mitrailleuse. Partout, la plupart des habitations sont incendiées.
On dénombrera 86 tués répartis sur cinq villages meusiens, surtout à Robert-Espagne et Couvonges. A Beurey-sur-Saulx, des Malgré-Nous - des Alsaciens-Mosellans enrôlés de force dans la Wehrmacht - ont prévenu les habitants et permis à la plupart de fuir à temps dans les environs. A Mognéville, un notaire est notamment parvenu à persuader les Allemands de ne pas exécuter leurs otages.
Les mêmes soldats sèment la mort dans plusieurs villages de la Marne voisine puis en Meurthe-et-Moselle, portant le bilan de leurs exactions à environ 120 tués, selon l'historien Jean-Pierre Harbulot, auteur d'une étude sur le massacre de la vallée de la Saulx.
- Ce n'était pas des SS -
Comme les exécutions sommaires de civils à Maillé (Indre-et-Loire), Tulle (Corrèze) et Ascq (Nord), la vallée de la Saulx fait partie de ces "dramatiques seconds" souvent occultés par la mémoire nationale, qui s'est concentrée sur le symbole d'Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne) et ses 642 morts.
D'ailleurs, "Oradour a marqué à tel point les mémoires" que pendant des décennies, les habitants de la vallée ont cru qu'ils devaient eux aussi leur malheur à des SS, selon l'historien. Une version qui sera longtemps reprise par la mémoire officielle, en dépit de preuves contraires.
"Dans la mentalité d'alors, un crime SS était le pire qui soit, plus fort qu'un crime de soldats ordinaires", explique M. Harbulot.
En 1952, le tribunal militaire de Metz condamnera - par contumace - huit militaires allemands pour ce massacre: quatre à la peine capitale, les quatre autres aux travaux forcés. Mais les peines ne seront jamais exécutées, aucun d'entre eux n'ayant été retrouvé.
Le jugement n'a eu aucun écho dans la vallée de la Saulx à l'époque, d'après les recherches de M. Harbulot : "Personne ici ne pouvait ni ne voulait refermer ce malheur".
Aujourd'hui encore, les rescapés, leurs enfants et ceux des victimes viennent assister aux commémorations officielles chaque 29 août. "Plus le temps passe, plus j'ai l'impression qu'il y a de ferveur" autour de ces commémorations, estime le maire de Couvonges, Daniel Poirson.